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COLLECTIF ADN

POUR UN VRAI DÉBAT PUBLIC SUR LE NUCLÉAIRE


 

Lettre ouverte aux parlementaires français

le 2 octobre 2022

Nota : cette lettre ouverte n’est pas celle du collectif ADN
mais de personnes de différentes sensibilités.

Madame, Monsieur,

Le gouvernement prévoit, dans le projet de loi de finance 2023, des hausses conséquentes de dépenses publiques dédiées à la recherche, à la conception et à la construction de nouveaux équipements nucléaires militaires et civils. Le gouvernement prépare aussi un projet de loi visant à accélérer la construction de nouveaux réacteurs nucléaires. Et tout ceci sans aucun diagnostic sérieux et partagé de la situation actuelle, sans débat public digne de ce nom et sans que les citoyennes et citoyens puissent se prononcer sur ces choix qui engagent leur avenir et celui de nombreuses générations.

Ce n’est pas acceptable !

Considérant qu'une relance du nucléaire par la France serait une décision extrêmement lourde engageant de nombreu-ses générations, considérant que les citoyennes et citoyens doivent être pleinement informés de tous les enjeux de telles décisions et considérant qu’ils doivent pouvoir y participer, je vous demande de saisir la Commission Nationale du Débat Public (CNDP) pour qu’elle organise un vrai débat public sur le nucléaire et toutes ses dimensions, sans se limiter aux «Nouveaux réacteurs nucléaires et projet Penly ».

Je vous demande enfin de faire le nécessaire pour qu’un référendum d’initiative partagé puisse être organisé, à la suite du vrai débat public, afin de permettre aux citoyennes et citoyens français de se prononcer sur les questions de leur compétence.

Pour les deux premières demandes, il suffit que 60 députés ou 60 sénateurs saisissent la CNDP, dans les conditions définies à l’article L121-10 du code de l’environnement, puisque le projet du gouvernement de « relancer le nucléaire en France » est un projet de réforme d’une politique publique.

Pour la troisième demande il faut, dans un premier temps, qu’un cinquième des parlementaires présentent un projet de loi référendaire, comme cela vient d’être fait pour la taxation des superprofits.

Lors du vrai débat public, pour lequel je vous demande de saisir la CNDP, je souhaite que soient abordées par exemple les questions suivantes :

- faut-il poursuivre ou non l’exploitation des réacteurs existants au-delà de leur 4° visite décennale ?
- faut-il poursuivre ou non le retraitement des « combustibles usés » ?
- faut-il continuer ou pas la politique française d’armement atomique ?
- faut-il construire ou non de nouveaux réacteurs nucléaires ?
- faut-il construire ou non une nouvelle piscine d’entreposage centralisé de «combustibles usés» ?
- faut-il construire ou non Cigéo, centre d’enfouissement géologique des déchets nucléaires ultimes ?
- la France doit-elle continuer ou non d’ignorer le Traité d’interdiction des armes nucléaires ?

 

Dans l’attente d’une réponse favorable à ces demandes, je vous prie de recevoir, Madame, Monsieur, l’expression de mes respectueuses salutations.

 

Les signataires

Téléchargez cette lettre ouverte

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Cette initiative de Lettre ouverte a donné lieu à des suites, entre autres avec la pétition :
« Pour un référendum sur le nucléaire militaro-civil : ni débat tronqué, ni simulacre de concertation ».

Voir le Dossier « Pour un vrai Débat sur le nucléaire »

 

 

 

ANNEXE

 

 

ANNEXE EXPLICATIVE ET JUSTIFICATIVE
des demandes formulées dans la lettre ouverte du 2 octobre :

 

La première ministre, Mme Elisabeth Borne, indiquait dans sa déclaration de politique générale à l'Assemblée nationale le 6 juillet 2022 (extraits) : « Nous investirons dans le nucléaire avec la construction de nouveaux réacteurs et des innovations pour le nucléaire du futur. La transition énergétique passe par le nucléaire. Je sais que c'est une conviction largement partagée sur ces bancs. C'est une énergie décarbonée, souveraine et compétitive.».

À la demande d’EDF et de RTE, la Commission Nationale du Débat Public (CNDP), lors de sa séance plénière du 7 septembre 2022, décidait d’organiser un débat public sur le thème « Nouveaux réacteurs nucléaires et projet Penly ».

 

Pourtant, la CNDP indiquait dans sa note d’éclairage de février 2022, « Nucléaire - Les enseignements de 17 ans de débats publics et concertations » :

« Tous les débats publics et toutes les concertations ont été l’occasion de manifestations, de perturbations, ou de contre-débats et de boycotts. Cette conflictualité, qui est légitime dans une démocratie, ne s’est transformée en violence que lorsque les opposant.e.s ont eu le sentiment, fondé ou non, que les décisions étaient déjà prises et que le débat n’avait donc plus de raison d’être. Il est toujours concevable de débattre des sujets les plus conflictuels sous réserve que soient strictement et sincèrement respectés les principes de la participation.

La Commission souligne également que les débats publics sur le nucléaire sont particulièrement riches, argumentés et engagent toujours des questions de société. La parole citoyenne face à ces sujets jugés techniques ou complexes est d’un apport remarquable pour les décideurs.

Mais il est regrettable que seuls les projets de création d’installation nucléaires de base soient obligatoirement soumis à la participation du public sous la garantie de la CNDP.

Les projets de fermetures de centrales nucléaires, de prolongation de la durée de vie des centrales existantes, et plus encore dorénavant la programmation pluriannuelle de l’énergie, sont des débats qui échappent au droit à l’information et à la participation du public. »

 

La CNDP, présidée par Madame Chantal Jouanno (ancienne ministre de l’écologie), avait d’ailleurs rendu en séance plénière, le 1er décembre 2021, un avis recommandant que :

- « conformément aux dispositions internationales et nationales applicables, un débat public de programmation relatif à l’énergie nucléaire ait lieu,

- ce débat de programmation se tienne avant toute procédure de participation du public sur les projets decréation d’une installation nucléaire de base. »

 

La CNDP constate en effet « qu'une relance de l’énergie nucléaire en France représente un choix démocratique majeur, engageant les générations futures. Toute personne vivant en France doit pouvoir être pleinement informée de ces enjeux et participer à l’élaboration des décisions concernant cette politique. »

Elle soulignait « que le public n’a jamais pu être pleinement associé à ces choix énergétiques majeurs concernant l’énergie nucléaire. »

Elle constatait également que « les annonces de relance de la construction de réacteurs nucléaires ont été formulées avant toute procédure de participation du public prévue par les conventions internationales, en particulier la convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, ainsi que l’article 7 de la Charte de l’environnement, de portée constitutionnelle. »

Elle concluait que « à défaut, d’un débat public large, ouvert à toute personne vivant en France, le risque d’une radicalisation des conflits et d’un accroissement de la défiance à l’égard des responsables publics n’est pas négligeable. Seul un débat conduit dans le respect des principes d’indépendance, de transparence, de neutralité, d’argumentation, d’équivalence et d’inclusion qui régissent l’intervention de la CNDP peut contribuer à asseoir la légitimité de toute décision future concernant l’énergie nucléaire en France. La sensibilité de la question nucléaire interroge autant la transition écologique que la démocratie. »

 

La CNDP, se présente comme une « autorité française indépendante garante du droit à l’information et à la participation du public sur l’élaboration des projets et des politiques publiques ayant un impact sur l’environnement ». En organisant un débat public limité aux « Nouveaux réacteurs nucléaires et projet Penly», avant qu’ait été organisé un « débat public de programmation relatif à l’énergie nucléaire », la CNDP accepte de faire exactement l’inverse de ce qu’elle recommandait il y a peu. Elle est en pleine contradiction avec son avis et ses propres recommandations émises le 1er décembre 2021 en séance plénière.

Elle cautionne en outre les manœuvres anti-démocratiques du gouvernement, qui prépare un projet de loi relatif au nucléaire, sans débat public organisé par une autorité indépendante, mais en faisant croire tout de même qu’il y aura un « débat national » (ou concertation) présenté de la manière suivante sur le site internet de la CNDP :

« Une concertation nationale sur le système énergétique de demain, recommandée par la CNDP, devrait être organisée par le Gouvernement. Cette concertation interrogera la place de l’ensemble des sources de production dans la stratégie énergétique future.

Selon Chantal Jouanno, présidente la CNDP, « la concertation nationale sur l’énergie qui devrait être organisée par le Gouvernement doit être complémentaire du débat public « Nouveaux réacteurs nucléaires et projet Penly » organisé par la CNDP ». Cette concertation nationale sur l’énergie ne sera pas organisée par l’autorité indépendante qu’est la CNDP mais des garants de la CNDP devraient cependant être chargés de veiller à ce que le droit à l’information et à la participation du public soit bien respecté. »

 

Tout ce que dénonçait la CNDP, dans sa note d’éclairage de février 2022, est donc en train de se mettre à nouveau en place et avec sa caution puisqu’elle prévoit d’envoyer des « garants » au faux débat public envisagé par le gouvernement.

En outre, réduire le débat (ou « concertation ») à la seule dimension énergétique du nucléaire c’est empêcher les citoyennes et citoyens d’être pleinement informés de l’ensemble des enjeux, notamment militaires et géopolitiques, et de pouvoir en discuter.

Saisir la CNDP pour qu’elle organise un véritable débat public sur le nucléaire lui permettrait de sortir de ses contradictions et redonnerait du souffle à la démocratie sur un sujet dont les citoyennes et citoyens ont été écartés dès le départ.