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La saga des pubs atomiques

 

Comment les acteurs français du nucléaire ont construit leur communication auprès du grand-public
et comment le drame de Fukushima les a obligés à reprendre leur copie publicitaire à zéro.


 
  CulturePub 2011 - pubs jetables - Ouvrir ici si la vidéo ne s'affiche pas

Pub : comment EDF a vendu le grille-pain à la France

Terraeco, le 8 février 2012 (article reconstitué et complété depuis la source l'orignale)

 
Alors que l'Hexagone vient de battre un nouveau record de consommation d'électricité, retour sur vingt ans de matraquage publicitaire en faveur du chauffage électrique.

Près d’un logement sur trois se chauffe à l’électricité en France. Ce mode de chauffage s’est considérablement étendu en France depuis 1975. A l’époque, 20% des logements neufs optaient pour l’électrique, contre 80% aujourd’hui. Un choix clair et net, que la France est la seule à avoir fait. Selon une étude menée par l’association Alternative pour les énergies renouvelables et l’environnement (pour le compte de Greenpeace et à partir de données de 2005), les ménages français posséderaient à eux seuls autant d’appareils de chauffage électriques que l’ensemble des foyers européens réunis. Ailleurs la pratique est rare. Le Danemark l’a tout bonnement interdit tandis que la Belgique en a proscrit la publicité. Et pour cause, ce mode de chauffage a de graves inconvénients (voir encadré).

Comment expliquer cette spécificité française ? A Terra eco, notre petit doigt nous dit que c’est en bonne partie grâce au lobbying d’EDF qui [a montré sa capacité à défendre le chauffage électrique pendant le Grenelle mais aussi grâce à ses très nombreuses publicités. La preuve en image :

 

En 1971, dans l’émission Cadet Rousselle, Guy Lux demandait aux téléspectateurs de voter pour une chanson en allumant des lumières. EDF mesurait le nombre de kilowatts consommés et ceux-ci étaient transformés en points. Le jeu de « La Chanson Lumière » dura de novembre 1971 à avril 1972.

 

 

 

En 1972, en 46 secondes et avec une pub animée en noir et blanc, EDF avance que le « chauffage électrique intégré isole du bruit » et qu’avec lui « les plantes revivent, les balais balaient moins, les odeurs s’évanouissent, les enfants s’enrhument moins l’hiver, tout le monde est plus heureux ». Conclusion : « le chauffage électrique intégré recrée les conditions naturelles de la vie. » Une perle à visionner ci-contre.

 

 

En 1986, en couleur cette fois, EDF fait rouler un petit garçon sur une musique jazzy dans un appartement pour vanter son système « bien-être ». La pub loue notamment la bonne régulation et le confort du système, sans cette fois citer le terme « chauffage électrique ». Les références aux watts sont plus subtiles : la maison a la forme d’une prise électrique, et le spot se termine sur le très subtil jeu de mot « soyez courant ».

 

 

 

 

En 1991, retour au dessin. Une femme à la voix lascive vante les mérites de son « chauffage électrique » qui « a déjà tout chauffé avant de (la) voir arriver ». Elle prend même son chauffage, représenté par un homme chauve en toge, dans les bras. Là encore, tout se passe comme si c’était grâce à l’énergie électrique que l’on peut se chauffer intelligemment et avec un thermostat.

 

 

En 1992, retour du même couple, et de la même stratégie. La femme EDF célèbre à nouveau les mérites de la programmation de la chaleur : « Mon chauffage électrique, je règle son thermostat une fois pour toute et après on ne voit plus le temps passer ».

 

 

 

 

 

En 1992, on assume l'origine nucléaire de la fourniture électrique.

 

 

 

 

En 2000, changement de tactique. Le système vendu et vanté s’appelle désormais Vivrelec. La publicité annonce une « révolution » dans le chauffage électrique. A l’époque, EDF va jusqu’à verser une prime aux acquéreurs d’un logement neuf qui se chauffent à l’électrique. Une prime qui durera jusqu’en 2004.

 

 

 

 

 

En 2001, nouvelle publicité pour Vivrelec, qui flatte les vertus de l’électrique, mais sans le nommer. Peu de nouveauté dans cette pub, mais on ne résiste pas à regarder cet homme qui n’arrive pas à quitter sa maison tant il aime « ses serviettes toujours tièdes ».

 

 

 

En 2001,
« Donner au monde l'énergie d'être
meilleur ».

Toute la com à revoir...

 

 

 

 

 

En 2004, encore une pub pour Vivrelec. Cette fois, elle montre une famille dont les enfants tristes sont contraints d’ouvrir leurs cadeaux de Noël dans la neige. Et leur propose de rénover leur chauffage électrique via un numéro azur. No comment.

 

 

Un choix doublement dommageable

La France bat de nouveaux records de consommation d’électricité. Le principal responsable de ces pics de consommation est le chauffage électrique. Ce ne sont pas les anti-nucléaires qui le disent mais RTE, Réseau de transport d’électricité, la filiale d’EDF chargée de veiller à l’équilibre entre consommation et production. Dans son rapport annuel 2011, elle indique : « L’usage du chauffage électrique augmente la sensibilité de la consommation aux températures froides. Cette sensibilité à la température de la consommation d’électricité est aujourd’hui de 2 300 MW par degré à 19h, heure de la pointe de consommation journalière en hiver. Elle n’a cessé de progresser ces dix dernières années, gagnant près de 70 MW par an. » Résultat, en hiver, un degré de moins entraîne une augmentation de la consommation équivalent à deux fois celle de la ville de Marseille.

Deuxième problème de cette production : elle entraîne beaucoup de pertes. En effet, le circuit de production de chaleur via l’électricité, principalement nucléaire, est plein d’embûches. Il faut d’abord que la centrale produise de la chaleur qui va être transformée en électricité. Mais cette électricité doit à nouveau être transformée via votre chauffage avant de vous réchauffer les mimines. Résultat : plus de 72% de l’énergie est perdue dans ce circuit. Un manque d’efficacité qui valent aux convecteurs électriques le surnom moqueur de « grille-pain ».


Publicité Areva : décryptage d’une propagande

 
« L'Épopée de l'énergie », Pub AREVA, janvier 2011 (deux mois avant l'accident de Fukushima)

 

Ré-écrire l’Histoire : le spot publicitaire d’Areva raconte une histoire, celle de l’énergie au moyen de tableaux successifs. Mais une histoire écrite ou plutôt ré-écrite pour convaincre de la modernité du nucléaire en 60 secondes. Ce qui est bien court pour un raisonnement, fort long pour une publicité.

par Arnaud GOSSEMENT, Terra-eco, le 9 janvier 2011

Dans « 1984 », Orwell avait très bien décrit comment un régime politique à vocation hégémonique a intérêt à ré-écrire l’histoire pour asseoir sa vérité et son autorité sur les citoyens. Nous convaincre que le nucléaire est une énergie renouvelable comme une autre et correspond au sens de l’histoire. Cette publicité emprunte aux ressorts classiques de la propagande : ré écriture de l’histoire et création d’un nouvel imaginaire du nucléaire.

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   Lipps Inc., Funky Town, 1980, clip de la chanson

La transition énergétique n’existe pas

par Jean-Baptiste FRESSOZ, Le Monde diplomatique,
« Manuel d'autodéfense intellectuelle », 2024

L'histoire est souvent mobilisée à tort et à travers dans les discours sur la transition énergétique. Analysant les deux derniers siècles, l’essayiste Jeremy Rifkin, gourou de l’« économie hydrogène », parle ainsi d’une première révolution industrielle (au IIXe siècle) fondée sur le charbon, puis d’une deuxième reposant sur le pétrole, et enfin d’une troisième, salvatrice, celle de l’hydrogène.

 

Pourtant, l’essentiel du charbon a été extrait après l’émergence du pétrole (95 % depuis 1900), et en grande partie à cause de lui.

Bizarrement, certains commentateurs invoquent la révolution industrielle comme solution au problème qu’elle a créé : « Il n’y a pas d’autre chemin pour sortir des énergies fossiles qu’une nouvelle révolution industrielle », professe ainsi l’ingénieur Pierre Veltz. La matérialité semble décidément manquer dans la culture historique commune.

Plus inquiétant encore, des responsables politiques sont friands de ce genre d’analogies douteuses : « La transformation à engager est (…) comparable à la première révolution industrielle » (Agnès Pannier-Runacher, ex-ministre française de la transition énergétique) ; « la transition énergétique est la nouvelle révolution industrielle » (John Kerry, émissaire américain pour le climat).

On pourrait croire ce discours « motivationnel » réservé au monde politique. Mais non. On le retrouve dans de nombreuses publications scientifiques issues des transition studies. Ce champ considère l’histoire comme un simple réservoir d’exemples de transitions qui permettraient de penser celle qu’il faut faire advenir. Le tour de passe-passe des transition studies consiste à confondre dynamique technologique et dynamique matérielle, qui n’ont pourtant pas grand-chose à voir. L’histoire montre que les énergies ne se remplacent pas. Elles se cumulent.


Areva, de fiasco en scandale d'État

Émission « Pièces à conviction », le 17 février 2016

Pertes de 10 milliards d'euros, démantèlement, plan social, soupçons de corruption... Comment le numéro 1 mondial du nucléaire en est-il arrivé là ? Qui est responsable ? « Pièces à conviction » vous propose son enquête sur le fiasco Areva, du naufrage à l'affaire d'État.

Areva dans les années 2000 : une fierté nationale, un des fleurons de l'industrie française, un fer de lance de l'image de la France... Aujourd'hui, quinze ans plus tard (on est en 2016), l'ex-numéro 1 mondial du nucléaire est à l'agonie. Pertes de 10 milliards d'euros, plan social, soupçons de corruption...

 

Le désastre a commencé par la construction mal maîtrisée d'un réacteur EPR nouvelle génération en Finlande. "Quand les ouvriers découvraient un défaut de construction, leurs chefs d’équipe leur ordonnaient de verser le béton pour masquer les malfaçons, et de la boucler", révèle Juha Aromaa, un militant de Greenpeace. Dès le début, l’entreprise a sous-estimé les coûts et les difficultés techniques.


Erreurs stratégiques et soupçons de corruption

Pendant dix ans, Areva, c'est aussi une patronne ultramédiatique et politique, Anne Lauvergeon. Sur les plateaux de télévision, « Atomic Anne » défend sa stratégie pour gagner. « Elle a même convaincu l’ancien président de la République, Nicolas Sarkozy. Il a mis trois ans à se rendre compte qu’elle lui racontait des histoires. C'est pour ça qu'elle s'est fait virer [en 2011] », témoigne le député UDI Charles de Courson. 

Pour les 6 000 salariés du groupe touchés par un plan social, l'histoire finit mal aussi. La justice soupçonne même des délits d'initié et opérations de corruption. Pour ce documentaire de 52 minutes, Pascal Henry a enquêté à Tchernobyl, en Finlande, en Namibie et en Afrique du Sud.